Démarche

Mon travail en sculpture aborde la question identitaire à travers un examen de notre condition temporelle. Une réplique de ma propre tête, me sert habituellement de point de départ. Objet d’étude choisi en fonction de sa faculté à concentrer les traits distinctifs de l’individualité, ma tête est toutefois assujettie à des programmes qui génèrent des distorsions. À travers les nombreux visages qui ont, à ce jour, donnés forme à ce travail, je joue à réévaluer mon identité dans une tentative de traduire les accidents de la vie courante et la fugacité de l’existence. 

Mon matériau de prédilection est la cire. Je l’utilise pour sa capacité à imiter les chairs. Sa malléabilité lui confère une propension naturelle à traduire le vivant. Cette proximité de l’enveloppe corporelle engendre un malaise qui nous entretient de notre précarité. Il m’importe de susciter des réactions émotionnelles, et pour y arriver, je mets en œuvre des techniques de moulage qui mettent en valeur le comportement imprévisible de la matière chaude. Des équivalences se créent entre la nature fugitive des émotions et les inévitables dérapages, accidents, grimaces découlant de l’utilisation de cette matière malléable et instable. L’entreprise se joue de la fixité habituelle propre au genre de l’autoportrait pour emprunter la voie de l’errance et des dérives identitaires.

Saluant au passage quelques personnalités historiques reconnues pour leurs fourberies, ces jeux de rôles animés d’une pointe d’ironie grotesque, m’ont amené à incarner quantité d’avatars empruntés au monde des puissants  (voir les corpus IncarnationsCésar et moi, Juliennes et autres tranches d’histoires et Gloires passagères). Dans un registre opposé, mes dérives identitaires m’ont amené à me glisser dans la peau des misérables (voir l’installation Déroutes quotidiennes. Programme long dit de la reconstruction). J’ai joué la carte de l’introspection lors d’une résidence à Saguenay (Casse-gueule. Une méthode pour se ressaisir en cas d’absence). Dans le cadre de l’exposition itinérante Humanorium, j’ai installé un dispositif s’apparentant à un théâtre intimiste conçu pour un spectateur unique, celui-ci étant invité à prendre place au cœur d’une enceinte composée de 46 têtes déformées issues de ma propre tête, provoquant un curieux renversement des rôles artiste/spectateur (Cabinet des curiosités #2). J’ai également exploré la dynamique des foules, multipliant en grand nombre mon effigie dans une tentative de traduire les émotions que partage le commun des mortels aux prises avec les assauts de l’existence (Querelles intestines et travail en cours).